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Documentaire "Décolonisation. Le bouleversement mondial" (Arte, 7 janvier 2020)

Le 9 janvier 2020 à 09h04

Documentaire ’Décolonisation
Le bouleversement mondial
Réalisé par Karim Miské & Marc Ball
Écrit avec Pierre Singaravélou et mis en voix par Reda Kateb

Diffusion sur Arte Mardi 7 janvier 2020
Disponible sur Arte.tv jusqu’au 6 mars 2020



"À contre-courant de l’histoire officielle des colonisateurs, cette fresque percutante inverse le regard pour raconter, du point de vue des colonisés, cent cinquante ans de combat contre la domination, et faire résonner au présent un déni qui perdure.
Comment synthétiser, en moins de trois heures, cent cinquante ans d’une histoire planétaire dont les non-dits, comme les dénis, réactivent au présent fractures et polémiques ? Pour retracer ce passé occulté qui continue de concerner intimement chacun d’entre nous, les auteurs ont choisi de tisser chronologiquement grande et petites histoires, continents et événements, avec des partis pris percutants. D’abord, en racontant l’histoire du point de vue des colonisés, ils prennent le contre-pied d’un récit historique qui jusque-là, si critique puisse-t-il être envers les crimes de la colonisation, reflète d’abord le regard de l’Europe colonisatrice. Ensuite, parce qu’embrasser l’essentiel des faits intervenus sur près de deux siècles dans des pays aussi différents, par exemple, que l’Inde et le Congo relève de l’impossible, ils ont préféré braquer le projecteur sur une série de destins et de combats emblématiques, certains célèbres, d’autres méconnus. De Lakshmi Bai, la princesse indienne qui mena la première lutte anticoloniale en 1857-1858, lors de la révolte des cipayes, aux vétérans Mau-Mau qui obligèrent en 2013 la Couronne britannique à reconnaître les atrocités perpétrées contre eux au Kenya soixante ans plus tôt, leur fresque en trois volets s’autorise l’ellipse pour mettre en évidence ces continuités et ces similitudes qui, d’hier à aujourd’hui, recoupent les lignes de faille de la mondialisation. Dit par l’acteur Reda Kateb – dont le grand-oncle Kateb Yacine est d’ailleurs l’une des figures du combat anticolonial ici ramenées au premier plan –, le commentaire coup de poing déroule un récit subjectif et choral. Portée aussi par des archives saisissantes et largement méconnues, des séquences d’animation, des extraits de films, de Bollywood à Nollywood, et une bande-son rock et hip-hop débordante d’énergie, cette histoire très incarnée des décolonisations met en évidence la brûlante actualité de l’héritage commun qu’elle nous a légué.

1. L’apprentissage
De la révolte des cipayes de 1857 à l’étonnante République du Rif, mise sur pied de 1921 à 1926 par Abdelkrim el-Khattabi avant d’être écrasée par la France, ce premier épisode montre que la résistance, autrement dit la décolonisation, a débuté avec la conquête. Il rappelle comment, en 1885, les puissances européennes se partagent l’Afrique à Berlin, comment les Allemands commettent le premier génocide du XXe siècle en Namibie, rivalisant avec les horreurs accomplies sous la houlette du roi belge Léopold II au Congo. Il retrace aussi les parcours de l’anthropologue haïtien Anténor Firmin, de la Kényane Mary Nyanjiru, de la missionnaire anglaise Alice Seeley Harris ou de Lamine Senghor, jeune tirailleur sénégalais devenu militant communiste et anticolonialiste.

2. La libération
Ce deuxième épisode, de 1927 à 1954, est celui de l’affrontement. Que ce soit à travers la plume de l’Algérien Kateb Yacine, qui découvre à 15 ans, en 1945, lors du massacre de Sétif, que la devise républicaine française, tout juste rétablie, ne vaut pas pour tout le monde, ou celle de la poétesse Sarojini Naidu, proche de Gandhi, qui verra en 1947, dans le bain de sang de la partition de l’Inde, se briser son rêve de fraternité, un vent de résistance se lève, qui aboutira dans les années 1960 à l’indépendance de presque toutes les colonies. Mais à quel prix ? Cet épisode suit aussi les combats de l’insaisissable agent du Komintern Nguyên Ai Quoc ("le Patriote"), qui prendra plus tard le nom de Hô Chi Minh, futur vainqueur de Diên Biên Phu, ou celui de Wambui Waiyaki, intrépide jeune recrue des Mau-Mau.

3. Le monde est à nous
Des indépendances à l’ère de la postcolonie, ce troisième épisode, de 1956 à 2013, s’ouvre avec les mots du psychiatre antillais Frantz Fanon (Peau noire, masques blancs, 1952), qui rejoint les maquis du FLN en Algérie. Il se poursuit dans l’Inde d’Indira Gandhi, qui se dote de la bombe atomique, dans le Congo sous influence de Mobutu ou dans le Londres de 1979, secoué par la révolte du quartier d’immigration de Southall, pour s’achever avec l’essor d’un cinéma 100 % nigérian dans les années 1990 et la victoire juridique des derniers Mau-Mau face au gouvernement britannique."

Pierre Singaravélou, Karim Miské & Marc Ball sont (à retrouver) sur Twitter !